Atlas de l'environnement du Morbihan
L'industrie
Le cadre réglementaire
La notion d’industrie regroupe des activités très diversifiées. Selon l’INSEE, elle correspond aux “activités économiques qui combinent différents facteurs afin de produire des biens matériels destinés au marché”. L’INSEE distingue également les industries d’extraction et les industries manufacturières qui ont une activité de transformation de biens (fabrication, réparation, installation d’équipements...). La Nomenclature d’Activité Française (NAF) propose ainsi 700 postes d’activités dont 291 pour le secteur industriel.
En raison de la variété de leurs activités, les impacts et nuisances potentiels des établissements industriels diffèrent par leur nature et leur ordre de grandeur. Depuis les premiers fondements règlementaires de la prévention des pollutions et des nuisances (décret impérial de 1810), le renforcement progressif de la réglementation a permis une meilleure connaissance et une surveillance accrue des activités industrielles. La politique française de réduction des risques industriels est encadrée par la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 dite "Loi Risques". Elle se base sur 4 axes majeurs :
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Les activités industrielles ou agricoles qui présentent des dangers potentiels pour l’environnement ou pour la santé ou la sécurité des riverains sont regroupées sous l'appellation "Installations Classées pour la Protection de l'Environnement" (ICPE). Leurs activités sont régies par le livre V du Code de l’environnement qui a codifié la loi du 19 juillet 1976.
En fonction de leur niveau de dangerosité et de leurs impacts potentiels, les ICPE doivent respecter des dispositions spécifiques visant à prévenir ou réduire les émissions polluantes, à contrôler la production et l'élimination des déchets et à prévenir les risques. Elles sont également soumises à surveillance et à des contrôles dont la fréquence dépend du classement de l'ICPE. Le respect de ces prescriptions est contrôlé par le service de l'inspection des installations classées, sous l'autorité du Préfet de département. |
Il existe 3 niveaux de classement des installations classées selon leur dangerosité et leurs impacts potentiels (articles L512-1 et suivants du code de l'environnement) :
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Il existe également un classement “Seveso” issu de la réglementation européenne (directive 96/82/CE du 9 décembre 1996 dite "Seveso 2") qui distingue 2 types d'établissements (Seveso seuil bas et seuil haut) en fonction de la quantité de matières dangereuses sur le site (Cf. chapitre : “Les risques naturels et technologiques”).
Cette directive est remplacée par la directive 2012/18/CE du 4 juillet 2012 (directive "Seveso 3") qui doit être transposée pour le 1er juin 2015 :
De nombreux principes de la directive IPPC existent déjà dans la règlementation française. La principale différence réside dans l'obligation pour l'exploitant d'utiliser les meilleures techniques disponibles. Ainsi, dans la règlementation ICPE, les installations doivent respecter des valeurs limites d'émission standards ou définies selon les spécificités environnementales du site par l'arrêté préfectoral d'autorisation. Les établissements soumis à la directive IPPC doivent utiliser les meilleures techniques disponibles ce qui peut conduire à des niveaux d'émission beaucoup plus faibles que les valeurs limites de l'arrêté préfectoral. |
La directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010, relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) – dite IED – procède à une refonte de la précédente. Elle est entrée en vigueur le 6 janvier 2011 et son délai de transposition expire le 7 janvier 2013 (les nouvelles obligations sont échelonnées dans le temps pour les installations existantes : 7 janvier 2014 pour celles dont l’activité était couvertes par la directive IPPC, 7 janvier 2015 pour les autres installations existantes). La transposition en droit français est en cours avec l’ordonnance 2012-7 du 5 janvier 2012, codifiée au Code de l’environnement. La directive IED a pour effet :
Tableau 1 : Classification des établissements industriels
D'après DRIRE Bretagne |
La surveillance et le contrôle
L'exploitant est responsable de son installation depuis sa création jusqu'à sa mise à l'arrêt. Il doit démontrer qu'il respecte les prescriptions techniques d'exploitation et doit donc mettre en place une politique de surveillance de son exploitation appelée "auto-surveillance".
Certaines ICPE à fort potentiel polluant sont également soumises à une déclaration annuelle des émissions de polluants et de déchets. Elles doivent ainsi déclarer :
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Site industriel à Vannes |
Les services de l'inspection des installations classées réalisent également des contrôles pour vérifier la conformité des installations aux lois et règlements et le respect des presciptions de fonctionnement.
Ces contrôles peuvent être inopinés ou annoncés à l'avance. Leur fréquence dépend du classement de l'installation. Lorsque des non-conformités sont détectées, différentes actions peuvent être menées en fonction de leur gravité :
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La règlementation prévoit également la mise en place d'instances locales de concertation et de négociation pour certaines activités polluantes ou dangereuses (ICPE Seveso seuil haut, centres de stockage de déchets non inertes et installations de traitement des déchets) ou à l'initiative du Préfet.
Ces institutions, les commissions de suivi des sites, rassemblent des représentants de l'Etat, des collectivités territoriales, des riverains ou associations, de l'exploitant et des salariés. Elles ont pour but :
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Les contextes breton et morbihannais
Fin 2010, l’industrie bretonne, avec près de 15 500 établissements industriels et 174 000 salariés, se situait au 5ème rang des régions françaises.
Le Morbihan comptait pour sa part 1 892 établissements industriels et 37 464 salariés en 2011 (chiffre CCI Morbihan) ce qui représente 15,9% de l'emploi total dans le département (INSEE, estimations d'emploi). Aux niveaux régional et départemental, c’est l’industrie agroalimentaire qui domine en termes d’emplois, avec respectivement près de 40% et 43% de l’effectif salarié industriel (Cf. Figure 1). Historiquement tournée vers l'abattage de volailles et la préparation des viandes, l'industrie agroalimentaire morbihannaise se développe aujourd'hui vers de nouveaux marchés :
La mécanique représente également un secteur économique important du département (15% des emplois industriels), au service des autres industries :
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Figure 1 : Part des différentes activités industrielles dans le Morbihan Source : CCI Morbihan En 2010, l'industrie agroalimentaire représentait 8% des emplois totaux dans le Morbihan |
La Bretagne comptait 8 384 installations classées soumises à autorisation en 2013 (environ 27 000 installations classées au total), ce qui la place au premier rang des régions françaises en nombre d'installations soumises à autorisation. Cette position est liée au nombre important d’élevages dans la région (Cf. chapitre : “L’agriculture”).
Dans le département du Morbihan, on comptait 1 956 installations classées soumises à autorisation début 2013 :
En 2010, 62 carrières étaient autorisées au titre de la législation sur les ICPE dans le Morbihan (Cf. chapitre : “Les carrières et les mines”). Début 2013, le département comptait également 3 établissements soumis à enregistrement au titre de la législation sur les ICPE (Cf. Carte 1). |
Agrandir la carte Exporter la carte Carte 1 : Etablissements classés SEVESO et établissements soumis à enregistrement dans le Morbihan en 2013 |
Les pressions exercées sur l'environnement
Le secteur industriel exerce différents types de pressions sur l’environnement : des pressions “directes”, exercées sur les sites de production (consommation de ressources, d'espace, rejets de substances polluantes, risques technologiques, nuisances lumineuses et sonores...) mais également des pressions indirectes, en amont (extraction des matières | premières, culture et élevage pour les produits agroalimentaires, transport de marchandises...) et en aval de l’étape de production à travers l’utilisation des produits par les consommateurs puis la gestion des déchets (Cugny-Seguin, 2006). |
La consommation d'eau
En 2009, environ 9 600 000 m3 d’eau ont été prélevés par l’industrie dans le Morbihan (Données Agences de l’eau - estimations SOeS).
Cela représente 13% des prélèvements totaux dans le département (Cf. Figure 2) - (Cf. chapitre : “L’atteinte à l’eau et aux milieux aquatiques”). Les industries les plus consommatrices d'eau sont les industries de transformation peu présentes dans le département : industries chimiques, industries du papier et du carton, industries pharmaceutiques, métallurgie, etc. Les industries agroalimentaires, fortement représentées dans le département, font également partie des grands utilisateurs et elles sont particulièrement exigeantes sur la qualité de l’eau utilisée. L’eau est indispensable dans les opérations de transformation de la matière agricole (lavage des aliments, chauffage…) et pour maintenir l’hygiène des installations et des machines. |
Figure 2 : Nature des prélèvements d'eau dans le Morbihan en 2009 Source : Données Agences de l'eau - Estimation SOeS |
La consommation d'énergie
En 2011, la consommation d’énergie finale du secteur industriel breton s’élevait à 845 kTEP soit 12,5% de la consommation énergétique totale de la Bretagne.
Entre 1990 et 2007, la consommation énergétique du secteur industriel breton (données non disponibles à l’échelle du Morbihan) a augmenté d’environ 17% tandis que l’emploi industriel progressait de 4,5% entre 1989 et 2006. Depuis 2008, on constate une baisse de la consommation énergétique pouvant être liée à la crise économique (Cf. Figure 3) (Observatoire de l’énergie et des gaz à effet de serre en Bretagne et Kerouanton, 2008). |
Elle a en outre changé de nature. La principale évolution concerne la part des produits pétroliers qui est passée de 43% de la consommation énergétique en 1990 à 9,7% en 2011 (Cf. Figure 4). La part des énergies renouvelables atteint quant à elle 6% de la consommation énergétique du secteur (Observatoire de l’énergie et des gaz à effet de serre en Bretagne, 2012).
Les principaux secteurs consommateurs sont les industries agroalimentaires avec 63% des consommations en 2011 (Cf. chapitre : “L’énergie”). |
Figure 3 : Evolution de la consommation énergétique Source : Observatoire de l'Energie |
Figure 4 : Nature de la consommation énergétique Source : Observatoire de l'Energie |
Les rejets industriels dans l'eau
Au niveau national, la part de l’industrie dans les rejets de substances polluantes dans l’eau est évaluée à environ 15% (50% pour l’agriculture et 35% pour les rejets urbains) (DRIRE Bretagne, 2008).
Les effluents d’un établissement ont 3 destinations possibles :
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Dans le Morbihan 37 établissements ont déclaré des rejets dans l’eau en 2011 (Cf. Tableau 2 et Cf. Carte 2) dans le cadre de la déclaration annuelle des émissions polluantes. Les principaux polluants rejetés par les industries en Bretagne sont :
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Agrandir la carte Exporter la carte Carte 2 : ICPE ayant déclaré des rejets dans l'eau en 2011 |
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Figure 5 : Nature des éléments métalliques rejetés dans l'eau par les ICPE soumises à déclaration annuelle des émissions dans le Morbihan en 2010 Source : Registre français des émissions polluantes |
Carrière de kaolin de Ploemeur |
Les émissions atmosphériques d'origine industrielle
Usine Guerbet (Lanester) soumise à la déclaration annuelle de ses rejets dans l'air |
Le secteur industriel est responsable de l’émission de nombreux polluants atmosphériques différents (Cf. chapitre : “La qualité de l’air et le changement climatique”).
En 2011, 150 établissements ont déclaré des rejets dans l’air dans le département (Cf. Carte 3) dans le cadre de la déclaration annuelle des émissions polluantes. Les ICPE ont déclaré l'émission des polluants suivants (Cf. Figure 6):
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Agrandir la carte Exporter la carte Carte 3 : ICPE ayant déclaré des rejets dans l'air en 2011 |
Cependant, les ICPE ne déclarent les rejets que lorsqu'elles dépassent des seuils d'émission, il est donc probable que d'autres polluants soient rejetés par les industries du département :
L'industrie morbihannaise émet également des gaz à effet de serre (GES), principalement du CO2 (près de 103 000 tonnes en 2011), mais également du méthane (2 000 tonnes environ en 2011) (Registre français des émissions polluantes). Par ailleurs, le secteur industriel est à l'origine d'émissions indirectes de GES à travers sa consommation d'énergie. Au niveau régional, les émissions de GES liées à l'énergie du secteur industriel se sont élevées à 1 432 000 tonnes de CO2 en 2011, soit 9% des émissions régionales liées à la consommation d'énergie (Observatoire de l'énergie et des gaz à effet de serre en Bretagne, 2012). |
Figure 6 : Nature des polluants émis par les ICPE soumises à déclaration annuelle des émissions dans le Morbihan en 2011 (hors CO2) Source : Registre français des émissions polluantes |
Les rejets industriels dans les sols
Déchets abandonnés dans une friche industrielle |
La pollution des sols par les industries peut avoir différentes origines :
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La base de données BASOL du Ministère de l'Ecologie, du Développement Durable et de l'Energie, recense quant à elle, 4 sites pollués ou potentiellement pollués dans le département qui nécessitent une action des pouvoirs publics à titre préventif ou curatif (Cf. chapitre : “Les sites et les sols pollués”).
Le plan national Santé-Environnement 2009-2013 prévoit l'identification et le diagnostic des établissements recevant des populations sensibles (établissements scolaires, crèches, établissements hébergeant des enfants handicapés...) implantés sur des sites potentiellements pollués du fait d'anciennes installations industrielles. L'objectif des diagnostics menés sur ces établissements est de vérifier que les pollutions éventuellement présentes dans les sols ne dégradent pas la qualité de l'air intérieur des locaux, ni le réseau d'eau potable ou les aires de jeux. Dans le Morbihan, 14 établissements ont ainsi été identifiés. Au 31 décembre 2010, 4 d'entre eux étaient en cours de diagnostic (Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement, 2012). |
Par ailleurs, 6 établissements ont déclaré des émissions polluantes dans les sols en 2011 dans le département (Cf. Carte 4).
Les principales substances concernées était l'azote et le phosphore, pour respectivement 127,4 tonnes et 33,8 tonnes, ainsi que du fer et ses composés. |
Agrandir la carte Exporter la carte Carte 4 : ICPE ayant déclaré des rejets dans les sols en 2011 |
Les déchets industriels
Les établissements industriels sont susceptibles de produire différentes catégories de déchets (Cf. chapitre : “Les déchets”) :
En 2011, 69 installations classées ont déclaré la production de 41 000 tonnes de déchets dangereux (Cf. Figure 7) et 31 installations ont déclaré la production de 145 400 tonnes de déchets non dangereux (hors boues d'effluents industriels) dans le Morbihan. Cependant, ces données sous-estiment probablement les gisements réels car les ICPE soumises à déclaration de leurs rejets polluants ne déclarent les production de déchets qu'à partir de 2 t/an pour les déchets dangereux et 2 000 t/an pour les déchets non dangereux. Les déchets produits par les établissements industriels non soumis à déclaration de leurs rejets polluants sont également inconnus. |
Figure 7 : Origine ou nature des déchets dangereux produits par les ICPE soumises à déclaration annuelle des émissions dans le Morbihan en 2011 Source : Registre français des émissions polluantes |
La Chambre de Commerce et d'Industrie du Morbihan a réalisé une estimation de la production de déchets non dangereux par les acteurs économiques du département (outil EvalDIB56). Cette estimation est basée sur des ratios de production (en tonne/salarié/an) élaborés grâce à des enquêtes menées auprès d'échantillons représentatifs d'entreprises morbihannaises. Ces ratios sont ensuite appliqués au Registre du Commerce et des Sociétés.
D'après cette estimation, le secteur industriel morbihannais aurait produit 242 600 tonnes de déchets non dangereux en 2011 (Cf. Figure 8) (CCI du Morbihan, 2011). La majeure partie de ces déchets est de nature organique (46%) en raison de l'importance des activités de l'industrie agroalimentaire dans le département. |
Figure 8 : Nature des déchets non dangereux produits par le secteur industriel morbihannais en 2011 Source : CCI du Morbihan, 2011 |
Synthèse et enjeux
Le Morbihan comporte peu d’industries lourdes mais il bénéficie d’un secteur industriel dense dominé par l’agroalimentaire.
Les évolutions de la réglementation et le renforcement du management environnemental au niveau des sites de production ont permis de nombreux progrès et les pressions exercées sur l’environnement baissent en volume ou se stabilisent depuis les années 90. En 2010, les établissements industriels bretons ont ainsi investi plus de 41 millions d’euros dans la protection de l’environnement (Cf. Figure 9). Cependant, en parallèle de la diminution des pressions de l’industrie sur l’environnement, de nouvelles activités se développent, de nouvelles substances, associations de substances chimiques et de nouveaux types de déchets apparaissent. L’industrie est également concernée par l’objectif de diviser par 4 les émissions nationales de gaz à effet de serre d’ici 2050 (le “facteur 4”). |
Figure 9 : Nature des investissements liés à la protection de l'environnement par les établissements industriels (industrie manufacturière et énergie) en 2010 en Bretagne Source : Enquête ANTIPOL, Insee, Ministères chargés de |
La prise en compte de préoccupations environnementales peut constituer un avantage pour les entreprises et industries en leur donnant une image valorisante de prise en compte de l’intérêt général mais aussi en favorisant les innovations et l’amélioration continue.
Ainsi la certification environnementale, de type ISO 14 001 ou EMAS (Eco Management and Audit Scheme) par exemple, consiste en la mise en oeuvre d’un Système de Management Environnemental, c’est-à-dire un ensemble de méthodes de gestion et d’organisation visant à prendre en compte les impacts de l’entreprise sur l’environnement et à les réduire. Les éco-labels(NF-Environnement, Eco-label européen...) apportent quant à eux des garanties tant sur la qualité d’usage des produits que sur leur qualité écologique. De nouveaux outils, comme le guide SD 21 000 de l’AFNOR (Agence Française de Normalisation) ou la norme ISO 26 000, font référence au développement durable avec la prise en compte de la responsabilité sociale/sociétale de l’entreprise. |
Par ailleurs, de nombreux mécanismes d’aides et d'accompagnement (technique et/ou financier) existent afin d’inciter les entreprises à réaliser des investissements liés à la protection de l’environnement :
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Sources et liens
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