Atlas de l'environnement du Morbihan
La flore et la faune
L'état des connaissances et les sources de données
La
connaissance de la faune et de la flore repose sur les observations de
terrain effectuées depuis longtemps, et aujourd'hui encore, par des
associations, des sociétés savantes, des naturalistes amateurs, des
scientifiques, des bureaux d'études… Les données disponibles sont plus nombreuses pour certains espaces qui ont fait l'objet d'inventaires spécifiques (sites Natura 2000, ZNIEFF, arrêtés de protection de biotope, réserves naturelles…). Concernant la faune, la liste des espèces présentes dans le Morbihan est bien établie pour certains groupes : mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens. Les effectifs et les répartitions spatiales des populations de ces espèces sont par contre inégalement connus. |
Certains groupes font
l'objet de suivis plus ou moins structurés (en particulier pour les
mammifères terrestres, mammifères marins et oiseaux). Les connaissances relatives aux invertébrés sont par contre nettement plus lacunaires : les espèces sont très nombreuses (à l'échelle planétaire, les invertébrés représenteraient près des 2/3 des espèces d'êtres vivants -Lecointre & Le Guyader, 2001-) et beaucoup d'entre elles ne sont pas encore identifiées. Concernant la flore, le Conservatoire Botanique National de Brest (CBNB) coordonne depuis 1991 un réseau d'observateurs amateurs qui alimentent une base de connaissances continuellement enrichie mais qui demeure bien sûr toujours provisoire et évolutive. |
Ce
travail a été récemment valorisé par la publication d'un atlas
floristique du Morbihan (Rivière, 2007), ouvrage de référence qui vient
compléter et mettre à jour les précédents (en particulier Des Abbayes
& al., 1971). Enfin, pour les espèces marines, le réseau benthique (REBENT) permet l'inventaire et le suivi de la flore algale et de la faune benthique sur plusieurs stations. Au total, début 2012, l'Inventaire National du Patrimoine Naturel -INPN- (inpn.mnhn.fr) recensait 1 444 espèces végétales, 1017 espèces animales et 56 espèces de champignons formellement identifiées et référencées dans le Morbihan, mais le nombre d'espèces réellement présentes est en fait largement supérieur. |
La flore
Le Morbihan abrite environ 1 700 taxons sur les 4 800 plantes supérieures de la flore nationale (Annezo & al., 1999 ; Rivière, 2007).
L'intérêt de la flore bretonne est lié à son originalité, car divers facteurs (géographie, géologie, climat…) engendrent une diversité de situations et de milieux dont certains rares à l'échelle nationale. En outre, la Bretagne constitue un carrefour biogéographique et abrite ainsi des cortèges floristiques caractéristiques de l'Europe occidentale, mais aussi des flores méditerranéenne et boréo-montagnarde (Rivière, 2007). Rivière (2007) cartographie la répartition spatiale dans le Morbihan de 1 468 taxons. La région littorale apparaît de loin la plus riche en espèces végétales. A un degré moindre, l'est du département se distingue également par une richesse floristique élevée (Cf. Carte 1). |
Agrandir la carte Exporter la carte Carte 1 : Nombre de taxons par maille UTM de la flore morbihannaise |
Tableau 1 : Répartition des espèces végétales par types de milieux dans le Morbihan
Source : Annezo & al., 1999 Eryngium viviparum |
Les milieux naturels abritant le plus d'espèces végétales sont les milieux littoraux et les zones humides (Cf. Tableau 1).
Certaines espèces végétales méritent d'être soulignées :
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Tableau 2 : Les 20 espèces végétales à très forte valeur patrimoniale dans le Morbihan
R : espèce protégée au niveau régional / N : espèce protégée au niveau national Sources : Annezo & al., 1999 ; Rivière, 2007 |
Plus globalement, sur les 502 taxons figurant sur la liste rouge du Massif Armoricain, 278 sont présents dans le Morbihan.
Les zones géographiques les plus riches en espèces de grande valeur patrimoniale sont les îles (Groix, Belle- Ile, Houat et Hoedic), la frange côtière, quelques secteurs de l'est (St Dolay/ Thehillac, Rochefort-en-Terre/la Gacilly, Ploërmel/Coëtquidan) et du nord-ouest du département (de Guiscriff à la forêt de Quénécan) (Rivière, 2007). Espèces en progression ou en régression, espèces nouvelles, espèces disparues… la flore évolue en permanence. Dans le Morbihan, Rivière (2007) constate l'apparition et l'expansion de beaucoup d'espèces et la régression ou la disparition d'un plus petit nombre d'autres. |
Mais parmi ces dernières, beaucoup sont des espèces de valeur patrimoniale. Ainsi, Rivière (2007) dénombre 61 espèces végétales disparues depuis 1971 (Des Abbayes & al.). Les terres cultivées et les zones aquatiques ou humides sont les milieux les plus affectés. Les causes sont en particulier liées à l'aménagement du territoire (urbanisation, régression et fragmentation d'habitats naturels…), aux pratiques agricoles (régression des prairies permanentes, généralisation des pesticides, recul de l'entretien de certains milieux -landes, prairies de fonds de vallées-, aménagements de l'espace rural…), à la surfréquentation touristique (érosion en zone littorale notamment) mais aussi à la dynamique naturelle des milieux (comblement progressif des étangs, boisement progressif de certains milieux ouverts…). | Les apparitions d'espèces nouvelles sont quant à elles essentiellement consécutives aux modifications climatiques (variations climatiques qui ont régulièrement lieu à l'échelle géologique… et changement climatique actuel lié aux activités humaines) et à l'intensification des échanges mondiaux (introductions d'espèces) (Rivière, 2007). |
La faune
Bernaches cravant dans le Golfe du Morbihan |
Environ
70 espèces de mammifères sauvages sont recensées en Bretagne, dont une
soixantaine d'espèces de mammifères continentaux et 10 espèces de
mammifères marins (www.gmb.asso.fr ; DIREN Bretagne, 1995 ; Ridoux & al., 2000).
Parmi ces espèces, 34 sont considérées comme déterminantes (il s'agit d'espèces à forte valeur patrimoniale, retenues sur des critères de rareté, de degré de menace et de statut de protection) pour la Bretagne (www.donnees.bretagne.developpement-durable.gouv.fr). Plusieurs espèces de mammifères continentaux sont considérées comme rares : la genette, le lérot, le muscardin, la musaraigne des jardins… En outre, 19 espèces de chauves-souris (toutes font l'objet d'une protection nationale et sont inscrites aux annexes de la Directive Habitats) sont présentes dans le Morbihan (Choquené, 2006). |
Enfin,
6 espèces sont dites semi-aquatiques, dont la loutre, la musaraigne
aquatique et le campagnol amphibie (Lafontaine & al., 2005). Le
vison d'Europe quant à lui, espèce menacée de disparition, ne fait plus
partie de la faune du Morbihan. Concernant les mammifères marins, on dénombre une espèce de phoque (phoque gris) et 9 espèces de cétacés (marsouin, dauphin commun, grand dauphin, dauphin de Risso, dauphin bleu et blanc, globicéphale noir, rorqual commun, cachalot et cachalot pygmée) en Bretagne (inpn.mnhn.fr). D'autres cétacés pélagiques sont observés plus occasionnellement. Les sites côtiers les plus importants pour les mammifères marins en Bretagne se situent cependant sur la côte nord et en mer d'Iroise (Ridoux & al., 2000). |
Une turquoise (zygène) sur un chardon anglais |
286 espèces d'oiseaux sont présentes dans le Morbihan (inpn.mnhn.fr),
mais une partie d'entre elles seulement y nichent (152 espèces
nicheuses -Groupe Ornithologique Breton, 1997-). 146 espèces sont
considérées comme déterminantes pour la désignation des ZNIEFF en
Bretagne (www.donnees.bretagne.developpement-durable.gouv.fr).
16 espèces, dont la bernache cravant, le phragmite aquatique et le
bécasseau variable, constituent la liste rouge des enjeux de
conservation internationaux de la Bretagne (Bargain & al., 2008).
Plusieurs sites morbihannais sont considérés comme d'importance
internationale pour certaines espèces d'oiseaux, comme par exemple le
Golfe du Morbihan. En ce qui concerne les poissons, 37 espèces d'eau douce sont recensées dans le Morbihan (inpn.mnhn.fr). 10 espèces sont considérées comme déterminantes pour la désignation des ZNIEFF en Bretagne et 3 espèces indicatrices (www.donnees.bretagne.developpement-durable.gouv.fr). Le saumon atlantique, l'anguille, la lamproie de rivière, la grande alose sont en particulier des espèces vulnérables présentes dans plusieurs cours d'eau morbihannais. Le Morbihan abrite 16 espèces d'amphibiens (tritons, salamandres, crapauds et grenouilles) et 11 espèces de reptiles (lézards et serpents) -Le Garff, 1988 ; inpn.mnhn.fr-. Un nouvel inventaire en cours devrait permettre de compléter et mettre à jour les connaissances. Enfin, 1 441 espèces d'invertébrés continentaux sont recensées dans le Morbihan (Chevrier, 2004), mais beaucoup plus sont présentes en réalité. 351 espèces déterminantes régionales ont été identifiées. Certaines espèces à fort enjeu patrimonial ont fait l'objet de prospections spécifiques, par exemple le Pique-prune (Osmoderma eremita), trouvé dans le Morbihan lors d'une première approche à Campénéac, Questembert et Rieux (Chevrier, 2004), ou la mulette perlière présente dans certains affluents du Scorff (Holder & al. 2003). De nombreuses espèces de ces différents groupes faunistiques font l'objet de protection à divers titres (Cf. chapitre : “La protection et la gestion du patrimoine naturel et des paysages”). |
Les espèces introduites envahissantes
Les
aires de répartition des espèces végétales et animales évoluent en
permanence en fonction des changements de conditions de milieux. Les
invasions biologiques constituent donc un phénomène naturel de
l'évolution. Mais ce phénomène est de plus en plus amplifié et perturbé
par les activités humaines. L'explosion récente des échanges mondiaux a
multiplié très fortement les introductions d'espèces qui peuvent dans
certains cas avoir des conséquences négatives. Ainsi, à l'échelle planétaire, l'introduction d'espèces exogènes est parfois considérée comme la deuxième cause de perte de biodiversité après la disparition et la fragmentation des habitats (Mac Neely & Strahm in Muller 2004), mais le sujet fait encore l'objet de points de vues différents et de contreverses (Beisel & Lévêque, 2010). Outre les effets sur la biodiversité, les espèces introduites envahissantes, dites “invasives”, peuvent également pour certaines avoir des impacts économiques et sanitaires (vecteurs de maladies) parfois sérieux. Herbe de la pampa |
Les
transferts à l'origine des invasions biologiques peuvent être délibérés
ou non, et avoir des causes de natures très variées : échanges liés à
des productions agricoles, forestières ou aquacoles, introductions à
des fins esthétiques ou ludiques (jardins, aquariums, parcs
zoologiques…) L'expansion des espèces invasives est souvent liée à des milieux naturels perturbés. Face aux enjeux relatifs aux espèces invasives, le cadre juridique évolue progressivement. L'article L411-3 du Code de l'environnement pose le principe de l'interdiction d'introduction dans le milieu naturel des espèces animales et végétales non indigènes. Le décret d’application du 4 janvier 2007 prévoit la préparation d’arrêtés interministériels fixant les listes des espèces animales non domestiques et des espèces végétales non cultivées, dont l’introduction dans le milieu naturel et la commercialisation sont interdites. Pour les plantes non indigènes, un arrêté du 2 mai 2007 fixe l'interdiction de commercialisation, utilisation et introduction de deux espèces seulement : jussie à grandes fleurs et jussie rampante (cette 1ère liste devrait être complétée). La liste des espèces animales concernées est quant à elle fixée par un arrêté du 30 juillet 2010. En outre, la loi “Grenelle 1” du 3 août 2009 demande la mise en oeuvre de plans de lutte contre les espèces invasives. Un tel plan a ainsi été élaboré pour l'herbe de la pampa. Parallèlement, les acteurs commencent à s'organiser à l'échelle régionale (projet d'une cellule “espèces invasives de Bretagne” -DREAL, Conseil régional, CSRPN, Bretagne Environnement-) et départementale (Videlot, 2009 ; Leray, 2009). Les informations disponibles concernant les espèces invasives sont assez lacunaires. Dans le Morbihan, certains territoires et/ou certaines espèces font l'objet d'une attention particulière (ex : grand site Gâvres-Quiberon, bassin de la Vilaine -IAV, 2003- ; territoire du projet de PNR Golfe du Morbihan -Quenot, 2005- ...). |
Les plantes invasives
La
plupart de ces plantes sont d'origine américaine (régions
subtropicales), mais quelques-unes sont des méridionales européennes.
Toutes ont pu s'adapter au climat morbihannais aux hivers cléments
(Rivière 2007). Le Conservatoire Botanique National (CBN) de Brest a établi la liste des plantes vasculaires invasives de Bretagne (Quéré & al., 2011). Jussie (cette plante aquatique invasive |
Dans le Morbihan, 14 espèces végétales sont considérées comme des invasives avérées et installées (Cf. Tableau 3).
D'autres espèces présentent un caractère invasif moins préoccupant pour l'instant : elles ont été classées "invasives avérées émergeantes", “invasives potentielles” et “à surveiller”. En milieu marin, 21 algues invasives ont également été identifiées dans le Morbihan (Pagny (coord.), 2010), par exemple : Grateloupia turuturu, Sargassum muticum (Stiger-Pouvreau, 2008). Dans le seul Golfe du Morbihan, Le Roux (2008) recense 13 espèces d'algues introduites. Tableau 3 : Liste des plantes invasives avérées et installées
* plante aquatique Source : Quéré & al., 2011 ; Rivière 2007 |
Les espèces animales invasives
La
faune morbihannaise est également concernée par les espèces invasives.
Ces dernières ont été introduites plus ou moins récemment. Certaines
provoquent des dégâts économiques et écologiques avérés, mais pour de
nombreuses autres l'impact éventuel n'a pas été étudié (Cf. Tableau 4).
De nombreuses espèces animales invasives sont également observées dans le milieu marin (70 recensées pour le Morbihan -Pagny (coord.), 2010-), par exemple la crépidule (compétition spatiale sur certains |
fonds sous marins avec des espèces autochtones), l'huître creuse Crassostrea gigas
(impact sur les peuplements des vasières et des habitats rocheux), le
bigorneau perceur japonais (prédation sur des huîtres d'élevage) -
Stiger-Pouvreau, 2008 -. Le Roux (2008) dénombre 14 espèces animales marines introduites dans le Golfe du Morbihan par exemple. |
Ibis sacré du Nil dans le Golfe du Morbihan |
Tableau 4 : Espèces animales invasives en domaine continental dans le Morbihan
Sources : Pascal & al., 2006 ; Leger, 2002 ; Vigneron & al, 2011 ; fédération départementale de pêche ; |
Synthèse et enjeux
La
flore et la faune du Morbihan sont riches et originales en particulier
en raison de la situation géographique de la Bretagne (position
péninsulaire et carrefour biogéographique) et de la diversité des
milieux naturels (Cf. chapitre : “Les milieux naturels”).
Le Morbihan abrite environ 1 700 espèces végétales sur les 4 800 recensées en France. La région littorale est la plus riche en espèces floristiques et abrite en outre la plupart des espèces à forte valeur patrimoniale (par exemple le panicaut nain vivipare, le liparis de Loesel et la bourrache du littoral) et toutes les espèces endémiques. La faune morbihannaise ne se caractérise pas par une richesse spécifique très élevée mais par des assemblages d'espèces originaux et par la présence d'espèces à forte valeur patrimoniale comme la loutre d'Europe, le phragmite aquatique, le saumon atlantique, la mulette perlière ou le carabe à reflet d'or… La grande richesse en espèces du milieu sous-marin est quant à elle progressivement mieux connue, en particulier grâce aux informations collectées par le REBENT. |
Certaines
espèces sont en voie de disparition ou de raréfaction rapide dans le
Morbihan, du fait en particulier de l'artificialisation du territoire
(urbanisation, régression et fragmentation d'habitats naturels…), de la
surfréquentation touristique de certains secteurs (érosion en zone
littorale notamment), de modifications de pratiques agricoles
(régression des prairies permanentes, généralisation des pesticides,
recul de l'entretien extensif de certains milieux -landes, prairies de
fonds de vallées-, aménagements de l'espace rural…), mais aussi de la
dynamique naturelle des milieux (comblement progressif des étangs,
boisement progressif de certains milieux ouverts…). La présence d'un
nombre croissant d'espèces invasives peut également dans certains cas
avoir un impact sur la flore et la faune autochtones. Diverses actions sont entreprises pour tenter de pallier ces menaces qui pèsent sur le patrimoine naturel (Cf. chapitre : “La protection et mise en valeur du patrimoine naturel et du paysage”). |
Sources et liens
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www.bretagne-environnement.org |